dimanche 14 octobre 2012

Point d'histoire familiale - Alice Victorine Ménerat


Pour ce nouvel épisode de "point d'histoire familiale", je vous emmène dans le Beauvaisis, autour des communes d'Orrouy, de Vez, de Béthisy-Saint-Pierre pour y rencontrer Alice Victorine Ménerat.

Cette personne a quelque chose de spécial car je l'ai connu indirectement grâce au témoignage direct d'une personne qui l'a connue. En fait Alice Victorine Ménerat était mon arrière-grand-mère, du côté de ma grand-mère paternelle.

Il se trouve qu'un jour je me promenais à Vez, dans l'Oise, comme où est née et où a grandi ma grand-mère paternelle et j'ai rencontré une dame très âgée qui, lorsque je lui parlais de ma grand-mère, se souvenait très bien de "la petite Henriette" ! Elle me dit aussi que sa mère, Alice Victorine était morte d'avoir eu trop d'enfants ...

Eglise d'Orrouy

Quelques années après, j'ai effectivement découvert qu'elle était décédée alors que ma grand-mère n'avait que 7 ans, mais une grâce du ciel a fait qu'elle n'a pas vu mourir la plupart de ses fils lors de la Grande Guerre de 14-18 où cette branche de ma famille a payé un très lourd tribut ...

C'est donc de cette personne et de ses ancêtres dont je vais parler aujourd'hui, une histoire pleine de surprise, comme souvent en généalogie !

1) Alice Victorine Ménerat 1868-1914

Alice Victorine est née le 2 mars 1868 à Orrouy, dans l'Oise du mariage de Alexandre Louis Victor Ménerat et Agathe Clémentine Barbier.

Orrouy est une petite commune de l'Oise, dans le canton de Crépy-en-Valois et depuis que les recensements existent, on n'y compte guère que quelques centaines d'habitants. C'est une commune rurale et les parents d'Alice Victorine sont issus d'un milieu très simple puisqu'ils sont tous les deux manouvriers, et ils demeurent au 3, rue de Vizery à Orrouy

Alice Victorine est l'aînée de la famille, mais les registres d'état-civil présentant une lacune pour la période de sa naissance, il est difficile de s'assurer qu'elle n'a pas eu de frère ou de soeur avant elle qui serait décédé en bas âge.

Toujours est-il qu'elle aura au moins 3 frères : Victor, Edgar et Pierre Antoine, ce dernier mourra d'ailleurs à Verdun au Champ d'Honneur le 2 septembre 1917 ... Mais, comme on le verra plus tard, la guerre, les guerres sont une sorte de signe marquant de cette branche.

Elle épouse Henri Debuire le 21 juin 1884 à Vez, commune voisine et lui donne pas moins de 9 enfants dont 8 garçons et la petite dernière qui était ma grand-mère !
Sur les 9 enfants, 3 mourront en bas âge, à quelques mois, et 2 (dont ma grand-mère) survivront à la Première Guerre Mondiale, les autres étant Morts pour la France entre 1914 et 1918 ... Un lourd tribut à la patrie car si on regarde la famille en 1918, il n'y a plus que le père et deux de ses enfants !

2) Alexandre Louis Victor Ménerat et Agathe Clémentine Barbier

Alexandre Louis Victor Ménerat est né le 10 mai 1846 à Gilocourt, une commune similaire à Orrouy, et qui s'y trouve à environ 2km à l'Est. Il est né du mariage de Jean Louis Ménerat et de Marie Françoise Potonnier. Il est décédé le 17 mai 1911 à Orrouy à l'âge de 65 ans. Toute sa vie il a vécu simplement, mais rudement par son métier de manouvrier.

Agathe Clémentine Barbier est née le 5 février 1846 à Béthisy-Saint-Martin du mariage de Jean Antoine Barbier et de Marie Honorine Ismérie Desain. Elle est donc issue de cette famille dont j'ai parlé dans mon article "une mystérieuse disparition". Béthisy-Saint-Martin se trouve à environ 3 km à l'Ouest d'Orrouy. Elle est décédée après son mari, à dont plus de 65 ans, ce qui est assez remarquable pour cette femme qui a eu une vie difficile, aidant son mari comme manouvrière pour pouvoir subvenir au besoin de sa famille.


C'est assez étonnant de constater que les deux époux proviennent de deux communes différentes et qu'ils se sont établis dans une troisième, située à mi-chemin ... Comment se sont-ils rencontrés ? Impossible de le savoir, même si deux hypothèses prévalent :
  • ils étaient manouvriers tous les deux, ils ont dont pu se croiser sur leur lieu de travail, les manouvriers n'ayant pas de terre en propre, ils louaient leurs "mains" à des cultivateurs plus aisés
  • ils ont pu se rencontrer lors d'une fête par des amis communs
Toujours est-il qu'ils se sont mariés entre 1866 et 1867 car en 1866, Alexandre Louis Victor, qui se nommait Victor de façon courante, vit encore avec sa mère à Gilocourt, son père étant décédé deux ans auparavant. Il est donc le seul soutien de famille pour sa mère car tous ses frères et soeurs sont partis !

Leur origine modeste, le fait qu'ils se soient mariés à 20ans, semble indiquer qu'il s'agit dans leur cas d'un mariage d'amour, qui a donné au moins 4 enfants :
  • Alice Victorine, née en 1868
  • Victor, né en 1872
  • Edgar, né le 4 mai 1877
  • Pierre Antoine, né le 7 janvier 1881

3) Jean Louis Ménerat et Marie Françoise Potonnier

Jean Louis Ménerat est né le 27 novembre 1807 à Morcourt, commune située à environ 4 km au sud de Gilocourt, du mariage de Joseph Ménerat et de Marie Geneviève Françoise Deneufmaison. Lui aussi a eu une vie simple puisqu'il a été manouvrier et batteur en grange, c'est-à-dire au plus bas de l'échelle sociale. Il est décédé le 6 décembre 1864 à l'hospice des malades de Compiègne à l'âge de 57 ans. Probablement que sa vie pénible aura eu raison de sa santé et on peut penser que le fait de vivre pendant des années au milieu des fibres végétales en suspension dans l'air n'ont pas aidé ...

Marie Françoise Potonnier est née le 29 mars 1810 à Gilocourt du mariage de Louis Marie Potonnier, charron et Marie Josèphe Cécile Moutonner, elle-même fille de charron. Elle décède après 1866.

De leur mariage qui a lieu le 28 décembre 1829 à Gilocourt, naîtront au moins 9 enfants, assez régulièrement répartis sur 20 ans ... :
  • Jean Louis, le 17 décembre 1830
  • Joseph Xavier, le 20 novembre 1832
  • François Auguste, le 13 juin 1835
  • Françoise Désirée, le 14 octobre 1837
  • Marie Antony, le 29 juillet 1840
  • Hortense, le 29 mars 1842
  • Prudence Louise, le 25 avril 1844
  • Alexandre Louis Victor, le 10 mai 1846
  • Lucie Léonie, le 30 septembre 1850

4) Jean Antoine Barbier et Marie Honorine Ismérie Desain

Jean Antoine Barbier est né le 23 ventôse an XI (14 mars 1803) à Béthisy-Saint-Martin, du mariage de François Barbier, maçon avec Marie Catherine Charlotte Lefevre, fille de vigneron ! Après avoir été maçon lui-même puis chanvrier, il décède après 1851.

Marie Honorine Ismérie Desain, est née le 19 juin 1811 à Béthisy-Saint-Martin, de l'union d'Antoine Desain avec Marie Magdelaine Desain. Pour savoir pourquoi je parle d'union et non pas de mariage, se reporter à l'article "une mystérieuse disparition". Elle est décédée le 11 avril 1849 à Béthisy-Saint-Martin à l'âge de 37 ans, ce qui est très jeune.

Ce couple a une histoire assez complexe car dans sa vie, Jean Antoine Barbier se mariera 3 fois :
  • avec Marie Louis Julie Caron, qui décède le 17 avril 1835 à 30 ans
  • avec Marie Honorine Ismérie Desain, qui décède le 11 avril 1849 à 37 ans
  • avec Marie Augustine Desain, qui décède le 23 juillet 1855
Quant à Marie Honorine Ismérie Desain, elle se mariera 2 fois :
  • avec Jean Baptiste Gressier
  • avec Jean Antoine Barbier
Ils étaient donc faits pour se rencontrer.
Durant leur brève union qui durera de leur mariage le 28 décembre 1844 au décès de Marie Honorine Ismérie le 11 avril 1849, 2 enfants naîtront :
  • Agathe Clémentine, le 5 février 1846
  • Henri, en 1847
Comme quoi, parfois, le destin tient à peu de choses ...

5) Joseph Ménerat, Marie Geneviève Françoise Deneufmaison, Louis Marie Potonnier, Marie Josèphe Cécile Moutonnet, François Barbier, Marie Catherine Charlotte Lefevre, Antoine Desain et Marie Magdelaine Desain

Ce sont tous les arrières-grands-parents d'Alice Victorine Ménerat.

Pour tous, j'ai pu remonter plusieurs générations au-dessus, les archives de l'Oise étant bien tenues (est-ce la proximité de Villers-Cotterêts ?). Pour ne pas être fastidieux, je vais m'attarder seulement sur Joseph Ménerat.

En effet, je parlais des guerres qui ont marqué la famille d'Alice Victorine Ménerat. Parfois, ces guerres ont eu du bon ...

J'en veux pour preuve, ces deux actes :

Tout d'abord, une alerte m'a été donnée par l'acte de décès de Joseph Ménerat, en date du 14 décembre 1839 :
L’an mil huit cent trente neuf, le quatorzième jour du mois de décembre à onze heures du matin, par devant nous Maire, officier de l’état-civil de la commune de Gillocourt, canton de Crépy, arrondissement communal de Senlis, département de l’Oise, sont comparus en la maison commune, Nicolas François Carbon, âgé de quarante trois ans, maçon et Honoré Isidore Gloux, âgé de vingt huit ans, maréchal ferrant, tous deux demeurant à Gilocourt, voisins du défunt.
Lesquels nous ont déclaré que le treizième jour du mois de décembre à onze heures et demie du matin, Joseph Menerat, âgé de soixante dix huit ans, manouvrier, né en Allemagne, demeurant à Gilocourt, veuf en premières noces de défunte Geneviève Deneufmaison, décédée à Morcourt, section de Feigneux, Oise, fils de … Menerat et de …, ses père et mère, est décédé en la maison de Jacques Paschal Dupont, son gendre, sise en la grand-rue dudit village de Gilocourt, ainsi que nous nous en sommes assuré, et les déclarants ont signé avec nous le présent acte près que lecture leur en a été faite.
Une acte a priori banal sauf qu'il est dit de Joseph Ménerat est né en Allemagne, dans les années 1760.

Et ce qui va permettre de boucler la boucle, c'est son acte de mariage, ou plutôt, l'acte de publication des bans, son acte de mariage étant pour le moment introuvable :

Le quinze de brumaire l’an huit de la République Française, une et indivisible, je, soussigné, moi agent de cette commune, certifie avoir publié à haute voix du futur mariage d’entre Joseph Ménérale fils, âgé de trente deux ans, de défunt Jean Ménérale, boulanger et brasseur à Eslingue, Electorat de Trêves et Thérèse Muria…, ses père et mère, ne connaissant pas au juste l’époque de sa naissance, ayant été dépouillé de ses papiers lorsqu’il fut prit prisonnier … François et ce d’une part, et de Geneviève de Neuf-maison, fille majeure, fille de Jean Joseph de Neuf-maison et de Geneviève Axars, ses père et mère de cette commune de notre part, tendant à faire rédiger l’acte de leur mariage suivant le loi par devant le président de l’administration du canton de Morienval, le jour décadie le vingt du présent mois, afin que personne n’en ignore, j’ai affiché la publication le quinze brumaire au lieu ordinaire et certifie qu’il ne s’est trouvé aucun empêchement audit mariage à Morcourt le jour, mois et an que dessus.

Et oui, Joseph Ménerat était un soldat "Allemand" (désolé pour l'anachronisme), fait prisonnier pendant les guerres de la jeune République Française. Apparemment, l'air de l'Oise a dû lui convenir puisqu'il est resté et qu'il a pris femme !

Pour l'anecdote, à Vez, "Ménerat" se prononce "Menn-ra", et il se trouve qu'aujourd'hui encore en Allemagne, dans la région d'où est originaire mon ancêtre, il y a des "Menrad" qui en allemand se prononce "Menn-ratt". Mes ancêtres auraient-ils, de génération en génération, transmise la façon dont mon aïeul prononçait son nom ?

Cet Allemand qui a eu une nombreuse descendance dont mon arrière-grand-mère qui a eu 4 fils et un frère tué par ces mêmes Allemands 115 ans plus tard entre 1914 et 1918, peut-être par des cousins ...

Et vous, avez-vous des ancêtres étrangers ?

Pour aller plus loin : 






           

7 commentaires:

  1. Bonjour Olivier, toujours aussi passionnant ;-)
    Pour ma part j ai beaucoup d ancetres belges et un ancetre italien du côté de ma branche maternelle.

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  2. Merci !
    D'ailleurs, si vous avez des tuyaux pour retrouver des registres BMS en Allemagne, je suis preneur !

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  3. Les guerres ont en effet transformé la vie de nos ancêtres.
    Très intéressant cette histoire familiale.

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  4. Bonjour cousin,
    la personne de Vez est t'elle Madame Fort ?
    Votre famille habitait "la cote du Château"
    Bien à vous
    Claude Leroy - ( Savoie)

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  5. re-bonjour cousin,
    magnifique site, beaucoup de découvertes historiques sur mes petits cousins, je suis moi aussi originaire de Vez depuis plusieurs siécles, nos généalogies se croisent plusieurs fois.
    Claude Leroy

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    1. Henri Debuire, marié à Alice Ménérat etait mon arrière grand oncle.Dans ma famille quand j'étais enfant j'ai souvent entendu parlé de mes ancêtres.Je suis né dans la maison ou ils ont vécu à VEZ. Alain Debuire

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  6. Bonjour, je viens de lire notre "histoire de famille" tant de fois racontée.D'après notre arbre généalogique, Joseph Ménérat, le fameux prisonnier, est né en 1768 à Ahéslinguen ( Electorat de Trèves) mon arrière grand père est le fils de Louise Ismérie Ménérat née le 4 août 1837 à Morcourt (60)

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