Pas plus tard que la semaine dernière je publiais un article qui montrait l’importance pour un généalogiste de disposer de quelques connaissances historiques pour comprendre les raisons profondes d’un usage ou d’une pratique donnée (en l’espèce la généralisation en France des registres paroissiaux à partir de 1668).
Je ne suis pas objectif lorsque je dis qu’un généalogiste
doit faire de l’histoire ou en tout cas en maîtriser les fondamentaux, étant
moi-même passionné d’histoire. Cependant, je suis convaincu que le fait de
connaître l’histoire de son pays, de sa province ou de son village sont un atout important pour le généalogiste.
Tout revient finalement à se poser la question suivante :
et si, faire de la généalogie ce n’était pas faire de l’histoire sans le savoir ?
Contextualiser
Normalement, une fois qu’on a réussi à bâtir l’ossature d’un
personnage, en ayant retrouvé son nom et quelques unes des dates clefs de sa
vie, on est tenté d’aller plus loin, de comprendre l’environnement dans lequel
il a vécu, de connaître les faits qu’il a pu vivre.
Parfois même on a des ancêtres qui sont acteurs de cette
histoire qu’on apprend à l’école : un soldat déserteur pendant la bataille
de Waterloo, un collecteur de gabelle dans le Maine, un couple obligé d’abjurer
sa foi protestante après la révocation de l’Edit de Nantes, etc..
Dans tous les cas, on habille cet ancêtre en le situant dans
son contexte. On est alors bien obligé de chercher à en savoir davantage sur la
période pendant laquelle il a vécu et sur les faits marquants de cette époque.
Non seulement cela nous permet de mieux comprendre les éléments qui figurent
sur les documents qu’on a en notre possession, mais en plus cela permet de
rendre cet ancêtre plus vivant.
Relier des faits entre eux
Lorsqu’on part d’un ancêtre et qu’on commence à identifier
sa descendance et ses alliances on crée une sorte de nébuleuse qui va venir
interagir avec d’autres nébuleuses pour fonder un groupe de personnes qui ont
été en relation les unes avec les autres.
Que ce soient les liens établis entre des parents et les
parrains et marraines de leurs enfants, les fratries, les mariages et
remariages, on crée un nombre important d’interactions entre des personnes
vivant dans un même lieu (ou en tout cas pas très éloignés les unes des autres)
et à une même époque.
C’est ainsi que l’histoire locale peut permettre d’expliquer
certains liens entre des familles ou que les liens entre certaines familles
peuvent expliquer des alliances entre descendants. Au niveau de la famille on
peut donc mieux comprendre l’enchaînement des unions ou des contrats passés
entre différentes personnes. Car rien, ou si peu, ne procède du hasard total
dans l’histoire de nos ancêtres.
Enquêter
On prête à Hérodote d’avoir inventé le concept « d’histoire ».
Pour lui, faire de l’histoire c’était mener une enquête puisqu’en grec ancien,
enquête se dit « historiè ». Mais que faisons-nous lorsque nous
recherchons une date ou un lieu manquant ?
Nous menons une enquête …
Faire de la généalogie c’est fouiller parmi des centaines
voire des milliers d’actes et de documents pour y trouver la pièce manquante au
puzzle. Parfois d’ailleurs, la découverte d’une seule de ces pièces permet de
donner une cohérence à plusieurs faits qu’on avait plus ou moins réussi à faire
coexister, tout en sentant bien que le système ainsi conçu était un peu bancal :
c’est une femme qui aurait eu son premier enfant à 13 ans alors qu’après
enquête, la femme en question s’avère être la sœur aînée de l’enfant et pas sa
mère …
Faire de la généalogie, c’est enquêter sans relâche jusqu’à
trouver sinon les preuves irréfutables, au moins un faisceau d’indices
suffisamment concordants pour qu’on ait de fortes présomptions. Bref, il faut
être un peu têtu et perfectionniste pour faire de la généalogie …
La généalogie c’est de l’histoire
Je vois donc de très grands liens entre la généalogie et l’histoire.
Mais peut-être que la généalogie est de l’histoire ? Une histoire locale,
familiale, plus ramassée et ayant un impact plus faible sur la population d’un
pays que l’Histoire avec un grand « H », mais de l’histoire quand
même.
Si on prend les méthodes utilisées en recherche historique
on constate sans problème qu’elles s’appliquent parfaitement à la généalogie.
Toutefois cette dernière discipline a une caractéristique bien à elle :
les liens qui relient ses acteurs à celle ou celui qui la pratique.
Ce lien particulier, génétique, ajoute l’émotion, la
tendresse, la colère, bref, toute une foule de sentiments bien humains à une
discipline plus neutre et analytique qu’est l’histoire.
La généalogie serait-elle donc de l’histoire avec du cœur en
plus ?
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Bel article ! Et j'aime bien la dernière phrase qui dit que la généalogie (petites histoires familiales) est l'Histoire avec du cœur ! Les deux sont intimement liées, c'est indéniable !
RépondreSupprimerEvelyne
J'en suis convaincu et c'est vrai que la généalogie est une recherche historique à part dans la mesure où elle nous touche de près !
SupprimerJe mettrais une légère nuance. La généalogie c'est la recherche des ancêtres, des actes. L'histoire familiale c'est l'Histoire : la grande et la petite, la sociale, l'économique, la politique. C'est le contexte dans lequel nous (re)plaçons nos ancêtres.
RépondreSupprimerJe sais je pinaille, d'autant que je suis d'accord sur le fond avec toi :-D
C'est vrai que cette nuance existe. Mais faire de la généalogie au sens strict du terme n'a pas, à mon sens un intérêt immense : certains se contentent d'accumuler les actes et les noms en jouant à celui qui aura l'arbre le plus grand ou l'ancêtre le plus prestigieux.
SupprimerC'est sans doute suffisant pour ces personnes, mais pour moi, ce n'est qu'un début et replacer ces ancêtres qu'on a parfois mis des années à débusquer dans leur contexte donne une saveur particulière à la recherche, que cet ancêtre soit un authentique aristocrate de la plus haute noblesse ou le plus humble des journaliers ...